Les droits de douane étant plus élevés en Europe, cela donnerait un avantage de 30% aux produits américains. La Commission européenne ? prévoit des suppressions d’emplois dans des secteurs stratégiques et admet une hausse des gaz à effet de serre.
L’abolition des barrières règlementaires conduirait par exemple l’Europe à autoriser les poulets lavés au chlore et le bœuf aux hormones, à abaisser les normes environnementales sur la pollution automobile ou la construction. Les entreprises auraient le droit d’attaquer devant des tribunaux privés les États coupables d’avoir fixé des normes sociales ou environnementales qui limitent leur profit.
La Commission, qui négocie au nom des citoyens européens, le fait sur la base d’un mandat secret, alors que les dirigeants des États-Unis y ont eu, eux, accès à travers un espionnage récemment révélé ! Comment dans ces conditions entamer des négociations ?
Ces derniers évènements, d’une rare gravité, devraient, à eux seuls, rendre caduque ce projet. Comment en effet mener des négociations quand la partie avec laquelle on négocie espionne en permanence ? Les États-Unis voient dans le projet de Grand marché transatlantique ? le moyen de défendre ses intérêts de grande puissance. La Commission européenne ? y voit l’occasion de favoriser le développement des multinationales et du système financier. Le peuple français comme ceux des autres pays européens n’ont rien à y gagner.
« Grand marché transatlantique » :
vœu présenté par le groupe Front de Gauche Communiste et Unitaire
du conseil régional Nord Pas de Calais en vue de la séance plénière du 4 juin 2014
Le 14 juin 2013, la Commission européenne a obtenu mandat de la part de tous les États membres pour négocier avec les États-Unis le Transatlantic free trade area (TAFTA) en vue de conclure un accord de partenariat transatlantique de commerce et d’investissement. Cet accord vise à instaurer un vaste marché de libre-échange entre l’Union européenne et les États-Unis, allant au-delà des accords de l’OMC.
Négocié dans le plus grand secret, il pourrait être paraphé d’ici 2015 sans la consultation des citoyens et des élus, et vise à instaurer la libre circulation des marchandises, des capitaux, des services et des personnes.
Il a ainsi pour ambition de démanteler les droits de douane restants déjà particulièrement faibles, entre autres dans le secteur agricole et de supprimer des “barrières non tarifaires†. Il prévoit en effet que les législations en vigueur des deux côtés de l’Atlantique soient « harmonisées » pour faciliter le libre-échange.
Or les USA sont aujourd’hui en dehors des principaux cadres du droit international en matière écologique, sociale et culturelle. Ils refusent d’appliquer les principales conventions sur le travail de l’OIT, le protocole de Kyoto contre le réchauffement climatique, la convention pour la biodiversité, mais aussi les conventions de l’UNESCO sur la diversité culturelle. Leurs règlements sont donc dans la plupart des cas moins protecteurs que ceux de l’Europe.
Considérant que la résolution sur le mandat de négociation doit être la plus ferme possible et que l’accord ne peut être accepté que s’il respecte certains choix de société et préférences collectives des Européens notamment :
- L’exclusion explicite de la culture, du cinéma et des services audiovisuels du champ de la négociation de cet accord
- La non remise en cause des choix de société en matière de santé, éthique, de droit du travail, de consommation, d’agriculture, qui constituent nos « préférences collectives ».
- La nécessaire protection des données personnelles et des droits de propriété industrielle et intellectuelle
- La protection des indications géographiques
- La préservation des services publics et de leur qualité
- La défense des intérêts stratégiques
- La non-introduction d’une clause Investisseurs/Etat dans le Traité qui autorise les entreprises à attaquer les gouvernements devant une juridiction internationale si elles estiment qu’une loi ou une décision a lésé leurs intérêts.
- L’exclusion de la protection des données des négociations dans la conclusion de cet accord.
- Les négociations doivent être transparentes et Parlement européen doit être tenu informé de l’état de la négociation à toutes ses étapes. Il doit avoir accès aux documents au même titre que les Etats membres
Ce marché commun libéralisé avec les USA risquerait donc de tirer toute l’Europe vers le bas et fragiliser les productions régionales, et produire des distorsions de concurrences déloyales en défaveur de nos acteurs économiques en particulier notre secteur agricole et agroalimentaire.
De plus, cet accord de Partenariat Transatlantique permettrait aux entreprises, en particulier aux multinationales, via la procédure dite du mécanisme privé de règlement des différends, d’attaquer en justice les Etats ou collectivités qui, de par leurs politiques de santé, de protection de l’environnement ou de régulation de la finance par exemple, ne se plieraient pas aux exigences d’un libéralisme de plus en plus effréné. Les investisseurs privés pourraient ainsi contourner les lois et les décisions qui les gêneraient puisque l’accord prévoirait que les entreprises puissent contester en justice des décisions prises par les Etats et réclamer des dommages et intérêts.
Dans ce cas, demain, des multinationales pourraient donc par exemple forcer le gouvernement français à accepter la culture d’OGM en plein champ, l’importation de bœuf aux hormones ou encore du poulet à la dioxine et chloré.
Outre la menace politique et démocratique qu’elle induit, une telle architecture juridique limiterait les capacités déjà faibles des États et des collectivités à maintenir des services publics de qualité, à protéger les droits sociaux, l’environnement et la santé, et à maintenir des activités culturelles préservées du marché.
C’est pourquoi, dans la continuité de sa mobilisation et de son refus en 2004 de l’Accord Général sur le Commerce des Services (A.G.C.S), la Région Nord Pas de Calais manifeste son opposition à un traité dont l’objectif viserait avant tout la dérégulation, la marchandisation du monde et l’amplification de la concurrence. Ainsi, le Conseil Régional
- demande un moratoire sur les négociations sur le Partenariat Transatlantique de commerce et d’investissement et la diffusion publique immédiate des éléments de la négociation,
- demande l’ouverture d’un débat national sur ce partenariat impliquant la pleine participation des collectivités locales et des populations.
- refuse toute tentative d’affaiblir le cadre réglementaire national ou européen en matière d’environnement, de santé, de protection des travailleurs et des consommateurs.
Si ces conditions n’étaient pas remplies, la Région Nord Pas de Calais se déclarerait hors zone TAFTA, et encouragerait les autres collectivités à le faire.