Le 30° anniversaire de la mort d’Aragon est l’occasion de revisiter la vie, l’œuvre et le rôle politique de l’un des grands acteurs de la création littéraire, de la vie culturelle et politique de notre pays, l’un des plus controversés et des plus méconnus aussi. Si le poète surtout (à travers tant de poèmes chantés par les plus grands interprètes) et le romancier, un peu moins, restent dans la mémoire commune, le journaliste, l’essayiste et des pans entiers de l’homme politique restent à (re)découvrir. C’est l’exercice auquel Pierre Juquin s’est livré avec empathie et franchise dans la somme qu’il vient récemment de consacrer à Aragon, à ce « destin français » selon la formule qui figure dans le titre de son ouvrage. Notre Association est particulièrement heureuse de contribuer à la redécouverte d’un des aspects les moins connus de la vie d’Aragon : celle du soldat mobilisé lors des deux guerres mondiales – l’expérience de la première permettant de mieux comprendre en fin de compte la prise de parti d’Aragon qui l’amènera, à travers les soubresauts de l’histoire nationale et internationale de l’après-1918, après être monté de nouveau en première ligne et avoir vécu « l’étrange défaite » de 1940, à organiser de façon originale une grande partie de la Résistance des milieux culturels, artistiques et intellectuels de notre pays de 1941 à la Libération.
« Du nouveau » sur Aragon, c’est ce que nous vous invitons à découvrir avec Pierre Juquin : comment Aragon a commencé à résister dans la France défaite, a renoué avec le parti communiste clandestin et participé au débat pour définir la façon la plus efficace de rassembler les énergies populaires et nationales autour du combat libérateur ; comment, remontant du sud vers Paris, arrêté incognito avec Elsa Triolet au passage en zone occupée, relâché par des Allemands débordés par le nombre de ceux qu’ils ont raflés, il rencontre dans la capitale en juillet 41 Georges Politzer et Danièle Casanova, défend devant eux et fait accepter la publication « légale » d’articles et d’œuvres dans les revues et la presse tolérées par Vichy, argumente sur la façon de mener le travail en direction des milieux intellectuels, débat sur la nature du patriotisme et du combat national à mener, préfigurant la stratégie du front politique à mettre sur pied pour résister, libérer et à terme reconstruire le pays, en rassemblant les forces populaires au-delà des divisions partisanes.
Questions aussi cruciales de nos jours ! Et questions posées en 1943, 44, 45 et au-delà par les acteurs de la Résistance qui restent d’actualité pour éclairer et mener les combats du présent.