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Atelier n°5
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Quel communisme ?

Les participants à l’atelier ont conçu cette note comme un document d’étape de notre travail. Elle a pour objet de résumer les questions que nous nous sommes posés, et la nature de nos échanges. Il ne s’agit donc pas du tout d’un texte préjugeant de la façon dont le congrès devrait aborder la question du communisme, mais bien de pointer les difficultés auxquelles nous sommes confrontés pour le faire de manière utile et efficace.


Sommaire

* 1.Pourquoi traiter une (...) * 2.Quels objectifs pouvons-nous

1.Pourquoi traiter une nouvelle fois la question du « communisme » ?

Pour tous les participants à l’atelier, le communisme est une exigence plus actuelle que jamais. Personne ne défend la conception d’une « nécessité du communisme » qui reprendrait une conception déterministe de l’Histoire. Mais l’accord est profond sur l’idée que les contradictions qui se creusent dans l’immense crise actuelle du capitalisme développent des exigences et des potentialités inédites de transformation émancipatrice des sociétés et du monde.

Le « communisme » demeure pour ces raisons une référence fondamentale de nos conceptions et de notre action. Bien au-delà du projet politique, nécessairement variable en fonction des grands enjeux de chaque époque, c’est une ambition qui lui donne son sens le plus profond : l’émancipation humaine, donc le dépassement historique des systèmes d’exploitation, de domination et d’aliénation, aujourd’hui le capitalisme.

C’est cette ambition qui caractérise pratiquement, théoriquement, philosophiquement notre vision de l’homme et de l’humanité. C’est elle qui donne de l’épaisseur à ce que nous proposons, qui fait sa radicalité spécifique, qui peut lier action concrète et « rêve » ou « idéal ». Si nous avons rompu avec l’idée de construire « le meilleur des mondes », notre spécificité politique demeure d’adosser un projet politique à cette vision d’une humanité capable de transcender son destin et de sortir de ce que Marx appelait la « préhistoire humaine ». A défaut, nous ne pourrions être qu’une force « plus à gauche », faisant disparaître de l’espace politique une dimension essentielle du mouvement ouvrier et de notre histoire politique.

Et pourtant, la question du « communisme » se pose à nous, de congrès en congrès. A ce stade de notre travail, nous y voyons plusieurs raisons essentielles, évidemment liées :

  • Inséparable d’un « mouvement réel » de transformation de l’ordre existant, le communisme est confronté au défi de répondre aux évolutions ultrarapides qu’impose la très profonde crise actuelle du capitalisme. Il doit répondre aux questions nouvelles de notre époque – mondialisation, écologie, révolution technologique informationnelle, etc. – et aux aspirations ou exigences ambivalentes qu’elles font émerger. « Mouvement réel », il pose donc en permanence et de manière indissociable la question du projet dans lequel il peut s’incarner à chaque moment, et de la stratégie qui vise, en fonction des conditions moment, à « unifier le prolétariat ».
  • L’échec, jusqu’à aujourd’hui, des tentatives de transformations sociales - celles qui se sont réclamées du communisme comme celles qui participaient d’une vision social-démocrate – repose inlassablement la question d’une perspective et d’une action authentiquement émancipatrice.
  • L’histoire politique du communisme, tout au long du 20e siècle, la densité de cette histoire, l’ampleur de son impact sur notre société comme sur le monde, marquent la perception du « communisme » de façon profondément contradictoire.

D’un côté, elle reste liée à d’immenses efforts d’émancipations qui se sont traduits de différentes façons selon les pays et les périodes : l’épopée révolutionnaire des pays qui ont pour la première fois tenté de construire une alternative au capitalisme, les combats de la classe ouvrière dans nombre des pays occidentaux développés, les guerres d’indépendance des peuples colonisés, etc.

De l’autre, elle renvoie massivement, au delà des crimes commis au nom du communisme, à un système qui a échoué, sur le plan économique comme sur celui de la démocratie et des libertés, et a été dans la plupart des cas balayé par l’histoire. Assez généralement, le mot communisme est, dans ses ombres comme dans ses lumières, connoté à une période passée.

Le fait est que nous n’avons pas réussi jusqu’à présent à dépasser cette ambivalence du « communisme » pour lui redonner un contenu et une image positive.

  • Cette ambivalence traduit une très profonde « crise du communisme » – dans notre pays comme à l’échelle mondiale – dont nous ne sommes pas sortis. Comme nous l’avons dit lors de précédents congrès : une conception du communisme a échoué. Nous avons fait beaucoup d’efforts pour élucider et critiquer les causes de cet échec. Nous avons remis en cause certains aspects de cette conception et produit des avancées en plusieurs domaines essentiels. Mais nous n’avons pas, en l’état, réussi à donner un contenu fort et cohérent à une conception actuelle du communisme, concrètement en prise avec les réalités de notre temps.

Quelles sont, dans le capitalisme mondialisé d’aujourd’hui, les principales contradictions de classes ? Quels sont les acteurs de la lutte de classes, et comment se forme leur « conscience » ? Que signifie aujourd’hui « révolution » ? Quelles formes penser « d’appropriation collective » et de « services publics » ? Qu’est-ce aujourd’hui que « l’Etat » ? Où sont les « pouvoirs » à conquérir (au sein des institutions nationales, infranationales, supranationales ? dans les entreprises, les multinationales, la finance...) ? Que devient l’opposition entre l’Etat et le marché ? Par quels outils penser la maîtrise collective des finalités et des conditions du travail ? Quelle place de l’individu par rapport au collectif ? Quelle relation entre liberté et égalité ? Quelle conception de la démocratie ? Quelles formes de propriété ? Quelle vision de la nation et de ses rapports à l’Europe et au monde ? Etc. C’est à de telles questions qu’il faut apporter des réponses cohérentes, à partir d’une analyse actuelle du capitalisme et de toutes les dominations, pour proposer les principaux repères d’un mouvement émancipateur dans la société et le monde tels qu’ils sont aujourd’hui.

2.Quels objectifs pouvons-nous nous donner, de ce point de vue, pour le 34e congrès ?

Il ne saurait être question, en quelques mois, de prétendre apporter toutes les réponses à ces questions sur lesquelles bute tout le mouvement progressiste depuis plusieurs décennies. Elles exigeront de toute évidence un immense travail d’analyse et d’élaboration qui demandera non seulement du temps, mais le concours de forces intellectuelles, sociales et politiques nombreuses et diverses.

L’objectif du congrès, en revanche, pourrait être de formuler clairement certains choix politiques, donnant visibilité et crédibilité à notre volonté de porter une conception neuve et attractive du communisme.

a)Reconnaître que le « communisme » est en crise.

Cette question a fait débat. Plusieurs camarades considèrent en effet qu’on ne peut pas parler de crise du communisme. L’un, soulignant que le communisme n’a jamais existé nulle part, propose plutôt de parler de crise de la politique suivie par certains partis communistes. Un autre considère que cette expression supposerait l’idée d’un « dépassement » du communisme lui-même. Un troisième prolonge cette idée en estimant que l’idée de « crise du communisme » relève d’une confusion entre les fins et les moyens : ce qui est en crise ne concernerait que les moyens mis en œuvre tout au long du 20e siècle au nom de l’idéal communiste.

Le débat a bien fait apparaître le contenu politique précis de ce désaccord. Personne effet ne soutient que parler de « crise du communisme » reviendrait à nier l’exigence d’une ambition émancipatrice qui est l’essence même de ce que nous appelons « communisme », ni les potentialités qui se développent en ce sens. En revanche, il ne paraît pas possible de contester les éléments objectifs et subjectifs d’une véritable « crise », notamment : l’échec des expériences qui se sont réclamées du communisme ; l’écart considérable qui sépare notre vision positive du communisme d’expériences qui s’en réclament aujourd’hui ; les difficultés politiques que connaissent beaucoup de partis communiste tels que le nôtre ; la connotation négative qui accompagne l’idée de communisme dans l’esprit de beaucoup d’hommes et de femmes. Au fond, parler de crise renvoie bien à la confrontation de ce qui est à dépasser, et de ce qui est en train d’émerger pour faire vivre une conception neuve du communisme, en prise avec les réalités et les aspirations de notre temps.

Dans ces conditions, le choix politique consistant à reconnaître la réalité de cette crise pourrait, en marquant une volonté de recul critique et constructif, devrait permettre de comprendre et faire comprendre les difficultés que nous connaissons, et donner crédit à nos efforts de renouveau.

Lui donner tout son sens implique, sans minimiser en rien l’état de la situation, d’articuler ce constat à l’analyse des obstacles et des impasses qui sont celles de l’ensemble du mouvement progressiste ; et de marquer avec force notre détermination à ne rien lâcher de ce qui est l’essence même de ce que nous voulons : une action radicalement transformatrice fondée sur notre ambition d’émancipation humaine.

b)Affirmer les choix à partir desquels nous voulons travailler à une conception neuve du communisme.

Il s’agirait là d’énoncer aussi précisément que possible, à partir de nos avancées de la période passée, des éléments clefs de ce que nous entendons aujourd’hui par communisme, en rupture avec les conceptions anciennes. Ainsi d’un processus révolutionnaire maîtrisé de bout en bout par le(s) peuple(s) ; de la place de l’individu dans la société ; de la conception de la démocratie ; d’une nouvelle vision de l’internationalisme ; de la relation entre l’exploitation capitaliste et l’ensemble des aliénations ; etc.

Partie intégrante de ces éléments de rupture, il s’agirait aussi de dépasser les dimensions objectives d’analyse pour donner une expression sensible de ce qui motive, au plus profond de chacun-e d’entre nous, l’engagement communiste : refus, révolte et colère d’un côté ; envie d’un monde meilleur, d’une véritable fraternité, d’une autre façon de vivre ensemble.

L’idée est avancée par un camarade que notre congrès pourrait énoncer à partir de là une sorte de déclaration de principes définissant « l’identité » de notre communisme, ce qui permettrait de s’inscrire dans l’actualité du débat à gauche. Et de montrer « au positif » les leçons que nous tirons de l’histoire du communisme au 20e siècle.

c)Donner sens et cohérence au regard que nous portons sur l’histoire du communisme.

De la période stalinienne au « rapport attribué au camarade Khrouchtchev », puis à l’affirmation du « bilan globalement positif », nos positionnements ont produit dans la société l’idée d’un long soutien, puis, jusqu’à la fin, d’un « soutien relatif » aux expériences qui se sont réclamées du « communisme ».

Certes, nous avons procédé tout au long des dernières décennies à des remises en cause très importantes d’éléments clefs du « modèle » soviétique : dictature du prolétariat, centralisme démocratique, marxisme-léninisme, etc. Mais faute d’être inscrites dans une cohérence forte, faute aussi d’être accompagné de l’effort de renouveau nécessaire, ces remises en cause, au coup par coup, n’ont pas fait sens dans la société.

Il ne s’agirait pas, au prochain congrès, de revenir une énième fois sur ce que nous avons déjà dit. Encore moins d’aborder cette question difficile sous l’angle politiquement injuste et inopérant de la contrition. Reste que, selon l’expression d’un camarade, il nous faut aller au bout d’une exigence de vérité. Tentons d’en dire clairement la logique d’ensemble. Et de pousser l’effort jusqu’à exprimer les raisons pour lesquelles nous avons si longtemps apporté notre soutien, même « relatif », aux régimes qui se réclamaient du « communisme ».

Cela nécessitera de clarifier notre positionnement actuel à l’égard de régimes qui se réclament aujourd’hui du communisme. Etant naturellement précisé que ce positionnement ne saurait être uniforme tant les réalités sont différentes, par exemple en Chine, au Vietnam ou à Cuba.

d)Poser clairement la question de l’image du communisme.

Cela implique d’abord de faire un « état des lieux ». C’est pourquoi l’atelier a proposé de faire procéder à une étude qualitative permettant de cerner aussi rigoureusement que possible ce qu’est aujourd’hui l’image du communisme dans la société.

Afin de contribuer à cette réflexion, il a également été prévu un programme d’auditions afin de savoir quelle approche ont de la question du communisme d’autres forces politiques de gauche, en France ou à l’étranger.

Plus généralement, il est nécessaire de réfléchir à la façon de changer positivement l’image du communisme dans la société. Les questions de fond sont évidemment l’essentiel. Mais il y a aussi la question des symboles, comme le mot « communisme » lui-même. Ce sont des questions si difficiles que nous avons parfois cherché à les résoudre sans les poser, comme pour l’abandon de la faucille et du marteau. La crainte étant, à poser de telles questions, qu’elles polarisent le débat au détriment des questions de fond.

Mais face aux questions existentielles qui nous sont posées, il faut faire le pari que nous serons capables et de faire des choix politiques novateurs, et de réussir à les rendre visibles et compréhensibles pour la société.

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