En langue de bois, c’est « un plan de relance pour restaurer sa compétitivité ». En réalité, 672 postes rayés (sur 5.000) dans un groupe, PPR, dont le résultat net a été multiplié par 2,4 au premier semestre. Et dont l’actionnaire principal, François Pinault, est la 7e fortune française selon Challenges. Mardi, La Redoute a annoncé la disparition en quatre ans de ses 81 boutiques : 430 personnes en moins. Pour « le traitement des commandes par courrier [91 personnes, ndlr] dont l’activité est en baisse régulière, le plan propose de le confier à un prestataire dont c’est le cœur de métier », ajoute le communiqué. Le marketing, la relation clientèle ou encore la direction financière et juridique sont également touchés. Au siège, à Roubaix, la saignée est de 151 personnes.
« Des restructurations depuis des années »
« Il a été dit que La Redoute affiche des pertes. Combien ? La direction est incapable de donner des chiffres, commente Jean-Christophe Leroy (CGT). Personne ne peut nier le recul d’activité de la Redoute, comme dans tout le commerce, de là à parler de pertes de l’entreprise, nous émettons de gros doutes. » Maria Pi (Sud VPC) se pose les mêmes questions. Jean-Christophe Leroy rappelle que « La Redoute s’est lancée depuis des années dans des restructurations », totalisant 1.300 postes en moins « sur les 8 dernières années ». Jean-Claude Blanquart (CFDT) évoque pour sa part un « résultat net négatif » à ce jour pour La Redoute. « Mais pour moi, une perte financière ne justifiera jamais ces licenciements, ajoute-t-il. Derrière nous, on a quand même le groupe PPR, qui a accumulé des richesses pendant des années. Si les dividendes n’avaient pas été versés, ils seraient aujourd’hui dans nos caisses. » « Quand PPR a racheté Gucci, La Redoute a été une vache à lait. Pourquoi la solidarité ne jouerait-elle pas en sens inverse aujourd’hui ? », embraye Maria Pi. Mardi, les représentants syndicaux ont reçu 600 pages de documents à ingurgiter avant la réunion des 28 et 29 octobre. « On va nommer un expert, j’imagine », prédit Jean-Christophe Leroy.
Le précédent des plates-formes téléphoniques
A aucun moment le communiqué de La Redoute ne parle de « licenciements », mais plutôt d’« externaliser », de « mobilité interne », d’aider certains à « mener à bien un projet personnel »... Faut-il être dupe ? En février, La Redoute se débarrassait de cinq centres d’appels (Nantes, Bordeaux, Toulouse, Marseille et Lyon) au profit de Téléperformance Midi Aquitaine, soit 185 téléopérateurs. « Les conditions de travail n’ont pas énormément changé au départ », confie Annie (prénom modifié). C’est venu après. « Si vous arrivez cinq minutes en retard dans le mois, vous n’avez plus droit au bonus [une commission sur les ventes, ndlr], même avec de très bons résultats les six mois précédents. On est dans la sanction. » Les salariés ont déjà perdu la prime de vacances et l’intéressement. En mai prochain, le 13e mois sautera et leur salaire perdra environ 20%. Le centre de Toulouse a déjà été fermé et « plus de la moitié de ces salarié(e)s ont été contraint(e)s de quitter leurs fonctions », dénonce Sud VPC, qui soutient « plus de 40 dossiers » aux prud’hommes de Roubaix. Ils « réclament au total un million d’euros à La Redoute pour l’ensemble des préjudices subis », précise le syndicat.
Ludovic FINEZ